Lose Control | Nuno & Sixtine

T’es installée sur le canapé du salon de chez Nash. Depuis la fin de l’été, c’est là que tu crèches, en attendant que ton petit chez toi soit comme tu l’as souhaité : architecte un jour, architecte toujours. Tu as tes propres idées, tu as ta propre imagination et tu sais ce que tu veux. Tu observes ton frère faire les cent pas, alors que toi tu boues intérieurement. Tu perçois des bribes de conversation, alors que son portable est collé à son oreille et tu sais pertinemment qui est au bout du fil. Si lui ne cesse d’échanger verbalement avec son meilleur pote, toi tu ne cesses de diriger tes pensées vers cette même personne. Tu repenses à votre dernière discussion, et en réalité, t’es loin de décolérer. Pire encore, tu ne peux même pas exploser de colère devant n’importe qui, parce que tout ça ne regarde que vous : Nuno et toi. T’as bien étalé le souci avec tes copines, sans pour autant dévoiler de prénom, et fidèle à elles-mêmes, elles te poussent à mettre les choses à plat, à être intransigeante, à dire ce que tu penses et comment tu le penses, à faire ton show à la Sixtine Sullivan. Tu ne sais pas où ni quand, alors tu restes là, et tu récoltes les infos que Nash laisse tomber, de sa discussion avec Nuno. Tes doigts manucurés viennent s’emmêler dans une mèche de ta chevelure, et ton regard ne cesse de fixer ton frère faire ses allers et ses retours. Ils se voient, aujourd’hui. Eux. A une soirée très certainement et là encore, tu grinces des dents, intérieurement. Pourquoi tu réagis comme cela, au fond ? tu ne le sais même pas. Pace que tu doutes très certainement qu’il va se rendre dans une boite pour gays, et encore moins dans un club pour les 3x20. Non, lui il choisit des boites avec des créatures de rêve, comme ils aiment les appeler. Rien que ce petit surnom te fout la gerbe, tellement t’es jalouse au fond de toi. Finalement le téléphone raccroché, tu te lèves du grand canapé, perchée sur tes hauts talons avec ta petite robe légère alors que dehors, il fait suffisamment chaud pour te permettre de porter ce genre de tenue - Tu sais Nash, il y a autre chose dans la vie que les soirées, les boites de nuits et les jolies filles  lances-tu, sur un ton totalement désintéressé, ou presque. - Ouais, mais c’est mieux avec ces petits suppléments, on se sent vivre et on profite. Que demander de plus ? Tu veux venir avec nous  ?  ta réponses ne se fait pas attendre. Un ‘non’ catégorique sort de ta bouche, probablement qu’il ne s’attendait pas à une telle froideur de ta part et tu le vois, l’étonnement sur son visage - J’ai un rendez-vous chez un client. D’ailleurs, il m’attend.  dis-tu sans attendre une quelconque réaction. Et quand bien même, t’as déjà le nez dehors.

Tu grimpes dans ton véhicules, et ta seule et unique préoccupation actuellement, est de te rendre jusque chez ton mari. Celui que t’as épousé avec plusieurs verres dans le nez, à Vegas, cette ville que du méprises plus que tout. Sur ton siège passager, des documents que tu as à peine envie de regarder. Pourtant, tu sais que c’est ce qu’il y a à faire, si vous voulez vous sortir de ce pétrin. Mais en as-tu réellement envie ? Ta tête te dit que oui, ton cœur te crie tout l’inverse. Pourtant, depuis quand as-tu l’impression d’en avoir un, de cœur ? avec les autres, non. Mais parfois, t’as envie de l’écouter, quand il s’agit du meilleur ami de ton frère. Tu ne sais pas pourquoi lui, pourquoi maintenant alors qu’au final, tu le connais depuis que tu avais l’âge de jouer à la poupée. Tu te rappelles, quand t’étais ado, d’essayer d’attirer son attention. Et puis ça t’est passé. T’as grandi, t’as changé, t’as fait ta petite vie et Nuno faisait presque partie des meubles pour toi. Le voir dans les couloirs de l’immense demeure familiale de New-York ne t’avait plus jamais vraiment étonné. Tu t’y étais habitué, mais jamais tu t’étais dis qu’un jour vous en seriez arrivé à ce stade. Le regrettes-tu ? oui. Non. Tu ne sais pas. T’as même pas envie de répondre à cette question, alors tu l’effaces de tes pensées et tu préfères de concentrer sur tout ce qu’il avait bien pu te balancer à la figure, lors de votre dernière conversation. Devant son bâtiment, tu te rends compte que tu ne sais même pas quel étage il vit, ni quel numéro. Tu pénètres dans l’immeuble et te voila face à la concierge, face à qui tu te place avec beaucoup d’assurance. - Bonjour, je suis Madame Alvarez. Je viens voir Nuno Alvarez. Je souhaite lui faire une surprise mais je n’ai aucune idée de l’étage, ni l’appartement en fait. Tu ne perds pas la face face à son doute. – Comment se fait-il que vous ne connaissez même pas l’appartement de votre époux ? Si tu ne t’appelais pas Sixtine Sullivan, sans doute qu’il t’aurait fallu plus de temps pour trouver réponse à cette question. Mais la réponse, tu l’avais déjà trouvée, voire même pensée trois fois dans ta jolie tête – Parce que je ne vis pas ici. J’ai un travail à New-York, et je ne suis pas encore venue à Miami depuis que lui est arrivé ici. En général, c’est lui qui vient jusque New-York. Tu lui tends ta carte de visite, sur laquelle il est bien indiqué :

3S Architect Inc.
Sixtine Seraphina Sullivan
New-York

La dame semble finalement te croire sur parole, lorsqu’elle t’explique où vit ton cher et tendre époux. – En tout cas, vous faites un très beau couple. Te lance-t-elle finalement. Couple. Voilà un mot qui te heurte, et pourtant tu te contente d’adresser un sourire à cette dame âgée – Merci. Une fois arrivé en haut de l’immeuble, tu t’approche de la sonnette sur laquelle tu presses ton doigts. Tu sens ton cœur qui palpite dans ta cage thoracique, mais t’es bien trop déterminée pour te laisser avoir par tes propres sentiments, alors qu’il ne s’est pas gardé de te balancer à la figure tout ce qu’il pouvait bien penser de toi. Vexée ? Totalement, et c’est pour cette raison que tu ne laisseras pas les choses comme elles sont. Tu jettes un dernier œil aux documents que tu tiens dans tes mains, avant que la porte ne s’ouvre sur l’homme que tu cherchais - Je sais. T’as pas le temps, t’as rendez-vous avec Nash, mais je m’en fiche. Nash peut bien attendre, et tes minettes aussi.  commences-tu sans un bonjour, sans rien d’autre de plus alors que tu t’introduis dans son appartement – Tu ne me connais pas, Nuno. Tu prétends me connaitre parce que tu connais mon frère depuis l’âge du bac à sable, mais tu ne me connais pas. Tu ne sais pas ce que je vis, ni ce que j’ai vécu. Alors je te défends de tirer quelconque conclusion sur moi, sur mes relations ou sur ma manière de vivre, d’être, de penser ou même d’agir. Ton regard soutient le sien, parce que tu refuses de te laisser insulter comme il a bien pu le faire. – C’est pas un crime d’être moi. C’est pas un crime de vouloir le meilleur. J’ai voulu être la seule et unique fille de mes parents. J’ai voulu être la seule et l’unique sœur de mes frères. J’ai voulu être la seule et l’unique architecte chez les Sullivan. J’ai voulu être la seule à avoir fait mes études à Harvard. Je veux et j’exige le meilleure pour ma personne, pour ma vie, ou encore pour mes choix. A mes yeux, j’ai les meilleurs parents aux monde, mes frères sont parfaits. J’ai grandi dans cette optique-là, et je continuerai à grandir comme ça. Et ça va peut-être flinguer ton idéal de vie, mais je veux et j’exige le meilleur et le plus beau des mariages. Je veux et j’exige l’époux parfait. Tu marques une pause, tu ne souris pas, tu n’as pas envie de sourire parce que t’es bien trop vexée et énervée pour cela, alors tu reprends – Et je veux et j’exige le divorce parfait. Dis-tu en laissant tomber les documents du divorce sur la première table venue. Finalement, tu t’approches un peu plus de lui, et tu termines – Ce que t’as pas compris, et que tu comprendras jamais, c’est que tout ça c’est subjectif et que la perfection avec un grand P n’existe pas. Mais c’est ma perfection à moi. Sauf que tu ne me connais pas et tu ne me connaitras jamais autrement que la sœur de ton meilleur pote. Tu pourras pas me donner tout ce que je veux parce que tu ne cherches même pas à savoir qui je suis. Tu ne te contentes que de ce que tu vois. Je l'accepte, très bien, t'es un petit joueur. Mais tu peux au moins faire l’effort de me donner le divorce que je mérite. Tu ne le quittes pas des yeux, et à nouveau, ta voix romp le silence - Mais n'oublie pas qui a entrainé qui, et n'oublie pas ce qui est vraiment en jeu. A lui de voir le plus important. Ton frère ? Toi ? Ou bien Vous ?